Le BD Healthcare Resilience Barometer 20241 évalue la résilience des systèmes de soins de santé dans 100 pays d’Europe, du Moyen-Orient et d’Afrique (EMEA). Le volet belge du Baromètre2 aborde la résilience de notre système de santé du point de vue de trois piliers clés : les patients, le personnel de santé et l’efficacité ainsi que la durabilité générale de la prestation des soins.
Les professionnels de santé sont l’épine dorsale d’un système de santé efficace et sûr. Ces dernières années, la question de la pénurie de ressources humaines a été au centre des discussions sur la résilience des soins de santé. Les estimations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) montrent qu’il pourrait y avoir une pénurie de 18 millions de travailleurs de la santé dans le monde d’ici 2030, principalement dans les pays à revenus faibles et moyens inférieurs3. Tous les pays repris dans le baromètre sont confrontés à une pénurie de médecins et d’infirmières/infirmiers, à une augmentation de la charge de travail et au burn-out.
Bien que les infirmières/infirmiers et les médecins soient très engagés dans leur travail auprès des patients, ils se disent « épuisés par la paperasserie, un équilibre malsain entre vie professionnelle et vie privée, un manque de travail en équipe, des possibilités d’évolution limitées et l’absence de considération de la part des responsables »4.
Il est donc de plus en plus difficile de maintenir l’attractivité de la profession, ce qui a des conséquences directes sur la qualité des soins, la satisfaction des patients et la résilience globale du système de santé.
Bien que la Belgique présente un ratio élevé d’infirmières/infirmiers par habitant, il existe un déséquilibre important concernant le nombre de patients par infirmière/infirmier, tant dans les maisons de repos que dans les hôpitaux. Au cours d’un débat exclusif organisé par BD Benelux, Rudy Maertens (directeur général de l’AZ Alma), le Dr Bart Demyttenaere (directeur médical de Solidaris)et le Dr Sebastian Spencer (directeur médical des Cliniques de l’Europe) ont discuté, entre autres, de la manière dont l’innovation technologique et organisationnelle peut améliorer l’efficacité et réduire la pression sur les professionnels de santé.
Selon Rudy Maertens, la mise en oeuvre à plus grande échelle des méthodologies de Lean Management peut jouer un rôle essentiel dans la réduction de la charge de travail. « En comprenant mieux le fonctionnement des processus et en les analysant de manière critique, nous pouvons reconnaître les actions inefficaces qui n’apportent pas de valeur ajoutée », explique Rudy Maertens. Une fois qu’une organisation s’habitue à examiner ses processus d’un oeil critique, une culture se crée naturellement qui permet de réduire le gaspillage, la variabilité et les temps d’attente. Rudy Maertens illustre ce propos par un projet ‘Lean’ important mené au sein du service d’oncologie de l’AZ Alma. « Le point de départ était que les infirmières/infirmiers et les médecins étaient surchargés par un trop grand nombre de patients et demandaient plus de personnel. Au lieu de cela, nous avons analysé et repensé les processus en profondeur. Les résultats intermédiaires montrent un gain de capacité de 20 % grâce à des processus plus efficaces. Nous pouvons donc aider plus de patients avec moins de ressources. »
Le Dr Bart Demyttenaere abonde dans ce sens, soulignant l’importance d’une meilleure qualité et d’une meilleure intégration des données. En Belgique, les données relatives aux soins de santé sont fragmentées et insuffisamment connectées, ce qui nuit à l’efficacité.
L’intelligence artificielle (IA) peut contribuer à un modèle de soins prédictif, permettant aux hôpitaux de mieux anticiper les besoins en soins et d’optimiser le déploiement du personnel.
L’innovation en tant que transformation organisationnelle et financière
Selon le Dr Sebastian Spencer, l’innovation va au-delà de la technologie. L’innovation organisationnelle est essentielle pour améliorer la collaboration à l’intérieur et à l’extérieur des hôpitaux. « L’innovation doit s’attaquer aux points sensibles. Je dis souvent à nos experts en innovation de se rendre sur le terrain, là où la ‘magie opère’, pour voir ce dont les prestataires de soins de santé ont réellement besoin », déclare-t-il.
Le Dr Demyttenaere renchérit immédiatement : la technologie peut permettre aux prestataires de soins de santé de se concentrer sur leurs compétences essentielles. Mais pour que cela soit possible, le système de financement doit évoluer en même temps. « Nous devons être en mesure d’intégrer des technologies innovantes dans notre système de soins de santé et d’améliorer ainsi le système », explique-t-il. Les soins à domicile, par exemple, peuvent être introduits de manière beaucoup plus générale, mais nécessitent un nouveau modèle de remboursement pour encourager la collaboration entre les hôpitaux et les réseaux de soins à domicile.
Prenant la parole depuis le public, Sabrina Suetens (beMedTech) souligne les nombreux exemples d’innovation de processus, tels que la gestion automatisée des médicaments, où les technologies médicales allègent la charge de travail et améliorent la santé mentale et physique des professionnels de la santé. « Ce ne sont pas les bonnes idées qui manquent, mais le défi de mettre en oeuvre le processus de changement », déclare Sabrina Suetens.
La conclusion est claire : c’est le financement qui détermine l’orientation du changement. En l’absence d’un modèle financier approprié, l’innovation restera fragmentaire et les prestataires de soins de santé continueront d’être sous pression. Un système de soins de santé pérenne, qui gère la pression exercée sur les prestataires de soins de santé, requiert une vision, une intégration intensive des données, une attention portée à la dimension humaine de l’innovation et une réorientation stratégique du financement. Vous souhaitez en savoir plus sur les perspectives et les tendances dans le domaine des soins de santé ? Téléchargez le BD Healthcare Resilience Barometer 20241 et découvrez comment les organisations de soins de santé s’adaptent à l’évolution des défis et quelles stratégies contribuent à un système de soins de santé plus résilient.
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